Louis Süe (1875-1968) et André Mare (1885-1932)
Louis Süe, architecte de formation, et André Mare, peintre, associent leurs talents en 1919 pour fonder La Compagnie des Arts Français, maison de décoration et d’édition française. Entourés d’artistes et d’artisans maîtrisant plusieurs disciplines des arts décoratifs et créant des ensembles en série comme pour de luxueuses commandes, ils se distinguent notamment lors de l’Exposition Internationale des Arts Décoratifs et Industriels Modernes en 1925.
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Louis Süe, né à Bordeaux en 1875, s’oriente d’abord vers l’architecture avant de se passionner pour la peinture. Exposant avec les Nabis dès 1902, il s’associe avec Paul Huillard pour ouvrir un cabinet d’architecte, avant de revenir à la peinture et de s’intéresser à la décoration. Il fonde en 1912 avec Jacques Palyart « L’Atelier Français », une maison d’édition de meubles et objets, et rencontre le peintre André Mare, de dix ans son cadet, avec qui il partage une vision commune. Mare, originaire de Normandie, s’illustre d’abord dans la reliure d’art avant de s’impliquer dans le décor et se démarque la même année au Salon d’Automne en présentant la « Maison Cubiste ».
Les deux artistes unissent leur talent en 1919 pour fonder La Compagnie des Arts Français, une maison d’édition et de décoration française située au 116, rue du Faubourg Saint-Honoré à Paris. Convaincus que la modernité viendra du travail autour de projets de décoration communs, ils s’entourent d’une équipe d’artistes et d’artisans de disciplines complémentaires, intéressés par les applications décoratives de leur art : les peintres Paul Vera, Charles Dufresne, Gustave-Louis Jaulmes, Bernard Boutet de Monvel, André Dunoyer de Segonzac, Jean-Louis Boussingault, le ferronnier Richard Desvallières, le sculpteur Pierre Poisson, le peintre et verrier Maurice Marinot, et le dessinateur André Marty.
Ils imaginent des ensembles « sérieux, logiques, accueillants », dans lesquels tous les aspects de la décoration intérieure sont abordés : décors, meubles, étoffes, céramiques, verreries, bronzes, luminaires, papiers peints. Deux types de production sont alors envisagées : une en série et une luxueuse à clientèle aisée, dont certains modèles sont reproduits dans un recueil paru en 1921, « Architectures », qui se veut le manifeste de la Compagnie et pour lequel Paul Valéry écrit le texte « Eupalinos ou l’Architecte ». Les dessins de Sue et Mare optent pour une esthétique opulente et théâtrale, caractérisée par des formes enveloppantes, des matériaux luxueux comme le palissandre, l’ébène, la laque, et des couleurs audacieuses.
Leurs réalisations se distinguent particulièrement lors de l‘Exposition Internationale des Arts Décoratifs et Industriels Modernes de 1925, pour laquelle ils remportent plusieurs distinctions, dont un Grand Prix du mobilier pour Mare et un diplôme d’honneur pour leur entreprise. Ce succès permet à la Compagnie de se faire une place de choix sur la scène française, avec des projets prestigieux comme l’aménagement de paquebots (le Paris en 1921, l’Ile-de-France en 1927) et de maisons privées, telles que celle de Jean Patou, ainsi que la décoration des grands salons de la Compagnie Générale Transatlantique.
Cependant, en 1928, la Compagnie des Arts Français connaît des difficultés financières. La direction est alors cédée à Jacques Adnet et l’activité de Süe et Mare se termine avec l’aménagement de l’hôtel particulier de Jane Renouardt. Bien que leur collaboration n’ait duré que quelques années, leur influence sur le design et les arts décoratifs reste incontestable, et leur travail continue de marquer l’histoire du mobilier français.


